Outil (ou le designer graphique face à la post-production)

Ed Fella, Collage, 1975

Lors d’une conférence récente, Ed Fella – figure iconoclaste de l’avant-garde du design graphique et « artiste commercial » autoproclamé – fait allusion à un collage réalisé au début de sa longue et prolifique carrière. Ce collage montre divers outils : une équerre en T, une boussole, une bouteille d’encre, une tasse de café, un brunissoir, un cendrier, récréant ainsi le plan de travail d’un designer graphique type, aux environs de 1975. Pince-sans-rire, Ed Fella confie au public : « Il manque seulement le café »1. Aujourd’hui, le bureau type est virtuel, inventé au sein des célèbres entreprises Xerox Park et Apple Computer : des dossiers, une montre, une poubelle et une bombe. Rien n’illustre mieux la transformation du design graphique que cette mutation métaphorique de son espace de travail : le designer a perdu sa dimension artistique pour devenir métier de technocrate et il est passé du statut d’emploi qualifié à celui de prestation de service.

Ce qui est supposé distinguer les humains de leurs ancêtres primates, c’est qu’ils ne se contentent pas d’utiliser les outils mais qu’ils cherchent à les intégrer à leurs activités quotidiennes, à leur découvrir de nouvelles fonctions et à imaginer de nouveaux usages. Cette séquence évolutive a été immortalisée sur grand écran par Stanley Kubrick dans 2001, l’Odyssée de l’espace (1968). Le film s’ouvre sur un groupe d’hommes-singes apprenant à se servir d’un os comme d’un outil et comme d’une arme. Après leur victoire triomphale sur un groupe rival, l’os est jeté en l’air et se métamorphose en satellite en orbite, scène qui projette le spectateur quelques quatre millions d’années dans le futur. Les protagonistes du film, Dave l’astronaute, et HAL, l’ordinateur de bord du vaisseau spatial, incarnent au final une mise en garde contre la technologie. L’homme finit par vaincre la machine et découvrir une entité extraterrestre dotée d’intelligence supérieure, qui préfigure la prochaine étape de l’évolution de l’humanité. Dave réincarné en fœtus, « enfant des étoiles » en quelque sorte, contemple la terre entière : deux sphères envahissent l’écran, un sac amniotique et la légendaire grande bille bleue. (Bien sûr, cette vision créative n’aurait pas été possible sans l’invention des techniques de l’échographie, ni sans l’imagerie satellitaire).

Un peu après la sortie de ce film épique, Stewart Brand – le gourou de la contre-culture – publia la première édition de The Whole Earth Catalog (1968), au sous-titre évocateur : « l’accès aux outils ». Le premier numéro de soixante-quatre pages de cette revue, laquelle devait atteindre plus de quatre cents pages, montrait en image de couverture la planète vue du ciel. Recensant les dernières idées, les meilleures pratiques, les technologies low cost et les outils utiles à l’époque, le catalogue de Brand était moitié bible pour un style de vie, moitié guide pratique du quotidien. Il définissait un noble objectif : « Nous sommes l’équivalent des dieux et nous ferions bien d’être à la hauteur. Jusqu’à présent, la puissance et la gloire exogènes – relevant de l’État, des grandes entreprises, de l’éducation officielle, de l’Église – masquent par leurs aspects négatifs les avantages que nous pourrions tirer de notre condition. En réaction à ce dilemme, et pour appréhender ces avantages, se développe le domaine du pouvoir individuel, personnel – pouvoir de l’individu à conduire sa propre éducation, à trouver sa propre inspiration, à modeler son propre environnement et à partager son aventure avec tous ceux qui s’y s’intéressent »2. Le Whole Earth Catalog présageait l’apparition de l’outil ultime, l’ordinateur personnel, et l’avènement d’une éthique de la technologie, véhiculée par la culture actuelle de l’Internet : monde de l’auto-édition, du contenu généré par les utilisateurs, de l’agrégation de contenu, des systèmes open source, des plateformes de distribution telles que l’App store, tout comme les réseaux sociaux et la connectivité, le phénomène du cloud et le partage de fichiers. Lors du discours inaugural que Steve Jobs prononça lors de la cérémonie de remise des diplômes à Stanford en 2005, il expliquait aux étudiants : « C’était une sorte de Google format papier, 35 ans avant la création de Google »3.

L’utilisation des outils par l’homme a été avancée comme explication possible de l’évolution humaine, car elle a favorisé le développement du cerveau, ce qui, avec la capacité propre à l’homme d’imiter les comportements, aurait favorisé la diffusion des idées et des techniques, conduit à l’avènement de l’agriculture, à la domestication des animaux et disons-le, à la naissance de la civilisation4. L’outil transforme fondamentalement notre réalité matérielle et virtuelle et, ce faisant, il nous transforme. Nonobstant le caractère grandiose de la vision, la distinction faite dans le domaine culturel en général, et dans le design graphique en particulier, entre compétences manuelles et compétences intellectuelles, semble autant regrettable qu’artificielle. Néanmoins, la ségrégation entre conception et production demeure au cœur du discours et des affres de la profession.

Le design graphique fut la première profession à être touchée par l’introduction de l’ordinateur personnel dans les années 1980 ; après tout, la PAO était son objectif stratégique. Plus précisément, l’ordinateur a transformé et a fini par supprimer le travail des divers artistes en charge de la production, des techniciens spécialisés en procédés photomécaniques, des retoucheurs, des maquettistes, des typographes, des photograveurs, et même de quelques imprimeurs. Il a bouleversé tout un monde qui a toujours entretenu une relation conflictuelle et plutôt confuse entre la sphère de la création et la sphère de la production, séparant souvent conception d’un côté et de l’autre travail et savoir-faire nécessaires pour transformer projets et consignes en produits de consommation de masse reproductibles. Cette séparation reflétait le clivage entre le travail intellectuel des cols blancs et le travail manuel des cols bleus – division qui perdure. Cependant, les pertes d’emplois infligées par l’ordinateur personnel à la profession de designer graphique ont été compensées, pour le meilleur ou pour le pire, par une facilité et une vitesse accrues pour visualiser les idées, en même temps que se réduisait le délai d’exécution des projets. L’efficacité de l’ordinateur a augmenté de façon exponentielle la possibilité pour les concepteurs d’introduire des variations et, pour les clients, des changements. La synthèse qu’il permettait entre des fonctions autrefois distinctes dans le design graphique contenait la promesse d’une réappropriation du processus de fabrication, mais sans pour autant former les graphistes aux compétences jusqu’alors externalisées.

Optimistes par nature, et repoussant leurs inquiétudes premières, les designers graphiques accueillirent l’ordinateur comme un outil de plus pour créer, et pas comme une technologie qui venait les remplacer, eux et leurs collègues, au cœur du processus de production. En 1998, environ une décennie après l’introduction de l’ordinateur personnel dans l’univers du design graphique, Lorraine Wild notait le paradoxe de la situation : « […] Parmi les designers graphiques, nombreux sont ceux qui croient que notre avenir dépend de notre capacité de trouver des solutions conceptuelles ; mais l’ironie veut que la technologie numérique ait ramené la production dans le bureau, nécessitant une attention de tous les instants. Les pratiques actuelles requièrent le potentiel intellectuel d’un think tank, allié au rendement d’une imprimante ultra rapide5. »

Certes, le nouvel outil ne s’adressait pas uniquement aux designers graphiques, mais ciblait un large public. Le design graphique s’était imposé comme un service professionnel à l’instar du design industriel et de l’architecture, et reléguait la production aux industries et aux techniciens qualifiés. L’accès soudain aux outils de production impliquait une diminution des contrôles à l’entrée de la profession et signifiait, pour l’avenir, un contournement possible des méthodes de surveillance. Le secret était levé pour les novices – votre propre mère savait désormais ce qu’était une police – mais aussi pour le grand public qui découvrait la réalité du design graphique. D’où la vague d’intérêt qu’il suscitait et l’afflux de designers. Mais le revers de la médaille pour la profession fut une concurrence accrue, des salaires moins élevés, davantage de dilettantes, et une érosion du métier en tant que tel. Plus inquiétante encore fut la requalification du design graphique comme un outil de plus.

L’ordinateur, bien sûr, n’est pas juste un outil de plus, pas plus qu’il n’est simplement la combinaison d’outils divers, sorte de couteau suisse numérique. L’ordinateur est plutôt un méta-outil : il produit d’autres outils. Ou comme l’écrit Jonathan Puckey, le créateur d’outils comme le Text pencil et du dictionnaire en ligne du Stedelijk Museum Bureau Amsterdam (SMBA): « Au lieu d’accepter communément les outils uniformisés tous identiques que nous vendent les grands distributeurs de logiciels, il nous faut retrouver la relation personnelle que nous avions avec nos outils. Il nous faut réintroduire des points de friction intéressants dans nos logiciels très optimisés. Nous devons apprendre à créer des outils nous-mêmes. Après tout, c’est ça l’ordinateur : un outil de création d’outils6. »

C’est ce que fait précisément une nouvelle génération de designers graphiques. Par exemple, Jürg Lehni, auteur de Scriptographer, un programme qui permet de passer de vecteurs numériques à d’autres procédés analogiques tel Hektor, dispositif robotisé de peinture par pulvérisation. Il a également créé Empty Words, une machine pour faire des posters au moyen d’un plotter de découpe, ou Viktor, machine pour dessiner à la craie. Casey Reas et Ben Fry ont inventé Processing, un langage de programmation open source que d’autres designers ont utilisé pour des visualisations de données. L’application Daytum de Nicholas Felton et Ryan Case, qui permet de recueillir des données personnelles, a été initialement créée pour être utilisée dans les projets personnels de son Annual Report*. Ces exemples montrent que la relation entre le design graphique et la technologie est entrée dans une nouvelle phase de maturation, avec une définition du design qui englobe la création de nouveaux outils permettant aux autres de pratiquer le design.

Depuis la disparition des guildes médiévales, le design moderne avait toujours cherché à se distinguer de la production manuelle d’objets uniques afin de privilégier la production d’objets en série, lesquels portaient moins les marques de la main et davantage l’estampille de la machine, ce nouvel ouvrier. Libéré des contraintes de la production, le designer moderne se devait de concevoir des méthodes afin que ses intentions puissent être fidèlement réalisées par d’autres. Les esquisses, roughs de mises en pages, pré-maquettes, mais aussi les systèmes colorimétriques, la standardisation des formats de papiers et de la formulation des encres, les prototypes, les maquettes et les épreuves de contrôle d’impressions furent quelques-uns des instruments inventés pour que l’exécution reste fidèle à la vision du designer graphique. Distinguer la conception et la planification de la fabrication et de la production relevait des attributs du designer moderne. Le métier en tant que tel ne disparut pas. Il resta attaché aux activités de fabrication manuelle et pour ce qui est de la fabrication industrielle, on parla de précision. Pour le designer, les valeurs du design graphique s’incarnaient intrinsèquement dans les activités de conception – l’ensemble des procédés et des techniques nécessaires à la visualisation et à la production de plans exécutables : dessins, rendus, maquettes élaborées (collage de matériaux pour simuler un document imprimé), montages de textes et d’images destinés à la reproduction photographique… La connaissance des procédés de production était essentielle à tout apprentissage du design, que ce soit en classe par le biais de livres tels que Production for the Graphic Designer de James Craig, ou en milieu professionnel, qu’il s’agisse, côté conception, d’impression et de reliure ou, côté production, d’ingénierie et de fabrication industrielle.

L’essai de Wild mentionné ci-dessus proposait aux designers graphiques une autre définition de leur métier, laquelle allait à l’encontre de l’idée qui dominait le marché, et qui se plaçait à contre-courant des changements technologiques traversant la profession dans les années 1990. Son essai ne relevait pas d’une pulsion de nostalgie pour sauver la création graphique. Il exaltait plutôt la valeur du métier comme connaissance inhérente et tacite, acquise par l’expérience directe et le savoir-faire, toute aussi valable que la connaissance théorique, plus distanciée et descriptive. Wild cite Malcolm McCullogh qui écrit dans Abstracting Craft: « Le sens de notre travail tient à la façon dont il est exécuté, pas simplement ‹ concepté › »7. Pour Wild, la valeur ultime du métier est liée au regard que nous portons sur le travail des designers graphiques, au fil du temps et des différents projets. C’est cette connexion qui donne sens à tant d’efforts et permet d’associer une œuvre à une personne particulière : « Lorsque l’expérience investit le domaine du design graphique, c’est peut-être ce que l’on entend par la « voix du designer » – cette partie du travail qui n’est pas tournée vers la finalité du projet, et sa production industrielle, mais qui obéit plutôt à une nécessité intérieure dictée par l’expérience du designer. L’« œuvre » du designer graphique est ainsi orientée de manière à dépasser et transcender l’objectif propre à chaque projet. Le métier est donc affaire de tactiques et de concepts, il consiste à saisir les opportunités dans les interstices de la connaissance, plutôt que d’essayer de tout faire entrer dans une théorie unificatrice8. Bien que la définition que Wild donne du design graphique ait parlé à la profession, elle n’a pas suffi à mettre fin à la crise de confiance qui plombait les designers graphiques, lesquels ne s’inquiétaient pas tant de la disparition de leur profession que de la dévalorisation de leurs compétences.

Au bout du compte, si ce que vous produisiez peut être fait par n’importe qui doté d’un ordinateur, pourquoi aurait-on besoin d’un designer ? Dans d’autres termes, pour emprunter la langue des affaires : en tant que designer, quelle est votre valeur ajoutée ? L’instinct naturel d’auto-préservation des designers graphiques avait besoin d’un nouveau récit sur la valeur du design. Puisque la première impression était que l’ordinateur dépréciait les compétences traditionnelles, la réponse devait être cherchée non pas dans la production, mais dans le domaine de la conception. Cette voie fut choisie en dépit du fait que l’ordinateur ne pouvait pas immédiatement démystifier les aspects plus intangibles du travail de design : l’art de la typographie, le savoir-faire des formes acquis par des années d’apprentissage et de pratique, la passion pour et le dévouement à une activité souvent assimilée à une démarche artistique, ou bien la capacité de résoudre un problème, les stratégies de communication et les techniques d’idéation qui sont le fruit de l’expérience. Malgré ces distinctions importantes entre novices et professionnels, le champ a continué de mettre davantage l’accent sur les capacités verbales et managériales plutôt que sur les aptitudes visuelles et artistiques.

Ce fut la naissance de tout nouveaux secteurs consacrés intégralement aux activités de l’hémisphère gauche du cerveau telles que : gestion et stratégies du design, design et innovation commerciale, conception de services et de systèmes, qui intégraient l’expérience des consommateurs, dans la réalité physique ou virtuelle. Ce que ces pratiques ont en commun, c’est la croyance dans le pouvoir des idées, des mots et de la recherche à façonner le design graphique, dont l’activité productive est redéfinie comme essentiellement conceptuelle et managériale. Parfois, par inadvertance, et occasionnellement à dessein, cette quête dévalorise les aspects formels, visuels et matériels du design, car elle néglige certains de ses aspects soi-disant plus superficiels, décoratifs et branchés. Si seulement on s’était référé au texte de Virginia Postrel, qui plaide pour la grandeur et les vertus de l’esthétique, du style et de la surface dans un âge dominé par le visuel : « Cette nouvelle ère est un défi pour nous tous – designers, ingénieurs, dirigeants d’entreprises, et pour le public tout entier – défi qui nous enjoint à penser différemment la relation entre surface et substance, esthétique et valeur. Les designers ont longtemps vécu dans la peur que les gens les croient frivoles et qu’ils considèrent leur travail comme ‹ joli, mais stupide › , dénigrant leur expertise durement acquise, et les mettant en première ligne pour les coupes budgétaires. Quasiment toutes les définitions du design commencent par énoncer avec emphase que le métier n’est pas simplement une affaire de surfaces »9. Mais, bien sûr que les graphistes sont des producteurs de surfaces, des millions de surfaces. Cette production est si vaste qu’elle se compare aux immeubles en dur. Selon Metahaven : « En design, la production de surface équivaut à la production d’espace10. »

Il est peut-être paradoxal qu’au moment même où les designers graphiques sortaient du tunnel et passaient de la forme « stupide » à un plan conceptuel supérieur, beaucoup d’autres personnes (amateurs, novices et jeunes designers) se découvraient une passion renouvelée pour la production, en grande partie via des procédés manuels, et parfois en réaction aux technologies numériques. C’est la culture entrepreneuriale du Do It Yourself, qui a réussi à s’emparer à la fois des moyens de production et des systèmes de distribution, et dont on découvre l’offre immense sur des sites comme Etsy, Threadless et Supermarket, ou lors d’événements tels que Flatstock ou le New York Art Book Fair, où les produits s’achètent, s’échangent et se partagent. Cette « nation du fait-main » se perçoit dans le regain de popularité des techniques d’impression manuelle, telles que l’impression typographique (métal ou bois) et la sérigraphie, mais elle est tout aussi perceptible dans le phénomène général de renaissance culturelle de projets artisanaux de toutes sortes, que ce soit la fabrication de cocktails classiques, la culture de légumes anciens, la découpe et la salaison de viande maison, ou la production expérimentale passionnée de guérilla jardinière et de « tricot urbain »11.

Alors que les designers d’une génération antérieure cherchaient une adéquation entre leur pratique professionnelle (c’est-à-dire conventionnelle) et leurs projets, ou bien qu’ils s’inquiétaient sur la manière de sensibiliser le public à l’appréciation de leurs produits, les designers d’aujourd’hui produisent dans l’instant et posent les questions plus tard. Cette attitude caractérise une jeune génération de

designers graphiques, lesquels ont véritablement créé un marché en grande partie par eux-mêmes et qui ont ciblé des gens comme eux. Ce flot de production est accessible et diffusé via Internet sur différents sites dont les noms donnent une idée du caractère ad hoc de la quête, et de l’esprit de découverte : Tumblr, StumbleUpon, Flickr, VVork, Ffffound !, Behance, ManyStuff. Il s’agit de la version vingt-et-unième siècle de la leçon de chose ; ou plus exactement, c’est du « make-and-post » – sorte d’archive visuelle auto-perpétuée de la culture portfolio du millénaire12.

L’atmosphère et le ton de ces sites, tout comme le travail qu’ils inspirent, se démarquent des pratiques des décennies précédentes. Fini le scepticisme, la critique et même le pessimisme des années 1990. Leur succède un nouvel optimisme, l’extase de la production. Selon Experimental Jetset : « C’est presque l’explosion punk/DIY du graphisme : des formes géométriques audacieuses, des couleurs vives, de grandes feuilles de papier imprimé, des expériences de pliage… Des gens qui montrent fièrement leurs affiches, simplement en les brandissant. Des travaux qui se disent résolument graphiques. Lorsqu’on regarde tous ces jeunes étudiants façonner leur environnement immédiat d’une manière aussi concrète et directe, c’est un vrai sentiment de bonheur qu’on ressent13. » Et qui pourrait y échapper ? Ce comportement est communicatif, comme un sourire. Mais si je pouvais, l’espace d’un instant, faire appel à mon moi sceptique des années 1990, j’observerais que cette œuvre évolue principalement dans un espace post-critique en suspension, en dehors de tout contexte (je dirais, si j’étais moins charitable, dans le « vide » ou dans une une « bulle »). La vitesse de l’information et le flux constant de matériaux nouveaux, avec les réactions qu’ils suscitent, créent une puissante boucle de rétroaction, comme un jeu de questions-réponses du design graphique. Il n’est donc pas surprenant qu’une grande part de cette œuvre soit perçue comme relevant de ce même esprit. Cependant, je ne voudrais pas juger selon les normes du passé. Les concepts de la vieille école : l’original, la copie et l’imitation n’ont guère de sens dans ce nouveau monde de la post-production, où ce qui est tendance (les sujets) importe autant que ce qui est à la mode (les formes).

L’ancien monde du design graphique et de la production était en fait une affaire de pré-production. Le design était dans tout ce qui précédait la représentation : les idées rendues visibles et les intentions rendues transmissibles. Aujourd’hui, cette sphère d’activité ne préoccupe guère les designers graphiques. Certes, ils sont toujours censés connaître les aspects de la production, et de nombreuses tâches sont totalement intégrées dans le logiciel de mise en page et du design. Mais les enjeux se trouvent ailleurs. D’un côté, nous avons la définition d’une profession qui s’appuie sur un concept inclusif et autonome qui sous-tend cette figure de la renaissance : le concepteur-producteur – à la fois créateur et fabricant, et peut-être même distributeur de son travail14. Paternité, originalité et singularité restent les mots clés pour parler de son activité, dont les critères sont souvent pré-modernes. D’un autre côté, nous avons l’univers de la post-production, qui se caractérise par les notions de copaternité, de référence et de collectivité.

Comme son nom l’indique, il s’agit d’un monde après-vente de formes préexistantes refaites par le designer, qui se met à la place de l’utilisateur, c’est-à-dire qui se pose comme destinataire ou consommateur d’une œuvre existante. Mais s’inscrivant à l’encontre des idées traditionnelles de ce qu’est la consommation, l’objet de la post-production n’est plus simplement consommé ou utilisé, mais il est prolongé, recomposé et transformé. La post-production donne ainsi une valeur ajoutée au produit, parfois à travers un nouvel usage (recyclage, upcyclage, ou downcyclage de produits, par exemple), mais le plus souvent, elle gagne en valeur symbolique. Prenez, par exemple, le concours sponsorisé par Greenpeace UK pour refaire le logo de BP après la marée noire dans le Golfe du Mexique15. Des centaines de personnes présentèrent des variations inspirées du logo officiel (primé) de BP, et une sorte d’humiliation publique virtuelle de la société s’ensuivit. En abordant le projet comme s’il s’agissait de refaçonner le logo officiel d’une marque, ces designers ont dû déployer habileté et stratégie dans leur approche de la soi-disant image de marque de l’enseigne : trop de changements et ils s’inscrivaient en rupture avec la marque d’origine ; trop peu de changements et la différence passait inaperçue. Lors des élections présidentielles américaines de 2008, la campagne de Barack Obama s’appuya sur un logo acclamé par la critique, qui eut tôt fait d’être reproduit à l’envi : à la main sur des pancartes, des tatouages éphémères, jusqu’aux citrouilles illuminées d’Halloween et aux biscuits maison16. Les industriels de la publicité utilisent de manière non-délibérée le terme « viral », sorte de « mème » culturel qui trouve son écho dans le cœur et l’esprit des consommateurs. C’est une stratégie appréciée qui n’est pas à vendre – au sens littéral.

Le designer dans l’univers de la post-production est un producteur ou un orchestrateur de cadres, de systèmes et d’actions qui permettent au design d’exister. Il a perdu son rôle traditionnel d’unique créateur de l’œuvre ; ce rôle a été usurpé par des « contributeurs », qui se comptent parfois par milliers. En témoignent, par exemple, trois récents projets de vidéo-clips qui utilisent le crowdsourcing, avec la participation de nombreux utilisateurs, chacun apportant sa contribution à l’œuvre collective. Le réalisateur Chris Milk et l’artiste Aaron Koblin, spécialisé dans les techniques numériques, ont collaboré à la création de The Johnny Cash Project (2010), un projet de vidéo clip participatif de la chanson « Ain’t No Grave » du regretté musicien. Les internautes peuvent contribuer en dessinant les images clefs de la vidéo, qui sont continuellement mises à jour en sélection aléatoire. Ils peuvent également choisir plusieurs options de visualisation, telles que les contributions les mieux notés, les images triées et sélectionnées de la version du réalisateur, ou bien ils peuvent procéder par style : réaliste, abstrait, etc. Milk et Koblin ont tous les deux également collaboré à The Wilderness Downtown (2010), film en ligne diffusé par le groupe Arcade Fire. Exploitant les fonctionnalités du navigateur de Google Chrome, le projet demande aux utilisateurs d’entrer l’adresse de leur domicile quand ils étaient enfants. En utilisant Google Map et Google Street View, la vidéo intègre ces informations géographiques dans le récit de « We Used to Wait. » d’Arcade Fire. Ces deux projets illustrent le désir de contenus personnalisés et d’options de visualisation personnalisables, mais aussi la capacité stratégique de la créativité collective. Les designers Jonathan Puckey et Roel Wouters ont créé pour le groupe C-Mon & Kypski une vidéo interactive participative intitulée One Frame of Fame (2010). Les internautes peuvent sélectionner des images de la vidéo qui accompagnent la chanson « More or Less », et avec leurs webcams ils peuvent insérer une image à eux pour ensuite télécharger le résultat. Plus de 34 000 utilisateurs ont pris la pose et apporté leur contribution personnelle à la création collective. La gravité philosophique du projet semble exister quelque part entre la déclaration de Jean-Luc Godard : le cinéma c’est vingt-quatre fois la vérité par seconde et la prédiction d’Andy Warhol : tout le monde sera célèbre pendant quinze minutes. Dans l’univers du Web 2.0 des contenus agrégés, participatifs, générés par les utilisateurs, la vérité cinématographique n’est pas un dépassement de la fiction, mais des tranches de réalité de plus en plus compressées.

Un autre exemple est le tee-shirt des Beatles d’Expérimental Jetset, avec les mots « John & Paul & Ringo & George » imprimés devant, logo devenu si attrayant et si efficace qu’il a donné lieu à une multitude de variations allant des imitations bas de gamme, aux hommages et aux parodies17. Dans son acception la plus large, le design de la post-production peut aller jusqu’à englober le design d’objets préexistants mais vierges : sacs fourre-tout, papier peint, tee-shirts, boutons, assiettes, affiches, tasses à café, etc. C’est la projection du graphisme sur tout type de surface. Ce n’est pas par hasard que ces surfaces tendent à être les formes commerciales du design lui-même – formats pratiques et disponibles, coques vides qui attendent d’être remplies – connues sur le marché sous le dénominatif affectueux de « merch ». Il convient d’observer que (à l’inverse des années 1990), il n’y a aucune honte à pousser à la consommation d’une manière aussi manifeste. Les designers font penser à ces groupes de rock qui, lors des concerts, vendent leurs produits dérivés à leurs fans (ce qui pour de nombreux groupes est une source majeure de revenus).

Le concept de post-production dans le design provient typiquement du monde de la production cinématographique et médiatique, où des séquences pré-enregistrées d’images, de sons, d’effets spéciaux, etc. sont réunies et éditées pour former un tout intégré. Mais cette analogie suggère que le nouveau produit est meilleur que la somme de ses parties. Je ne pense pas que cela puisse être dit de la post-production dans son acception culturelle. Dans le domaine de l’art, on dit que la post-production consiste à mettre en musique, à reproduire, à réexposer des œuvres existantes, ou bien à utiliser directement des objets « design », comme on dirait en dehors d’une galerie. Ceci suggère une sorte d’équivalence ou de relation tacite entre l’œuvre préexistante et la nouvelle. Nicolas Bourriaud, qui aborde ce sujet dans le contexte de l’art contemporain, invoque le DJ et le programmeur comme figures quintessentielles de la post-production. Selon lui, « Ces artistes qui insèrent leur propre travail dans celui des autres contribuent à abolir la distinction traditionnelle entre production et consommation, création et copie, readymade et œuvre originale. Ce qu’ils manipulent n’est plus un matériau brut. »18 Le langage de la post-production parle d’échantillonnage plutôt que d’appropriation, de partage plutôt que de possession, de formats et non de formes, de conservation (c’est-à-dire sélection) plutôt que de création, et de contexte comme facteur déterminant de la forme plutôt que de contenu. C’est une culture du re-: remixer, reformater, remanier, réinterpréter, reprogrammer, replanifier, redémarrer, réafficher, recycler.

Dans le monde de l’édition, ces stratégies prennent la forme de la réédition ou de copies pirates – réédition d’un matériau épuisé, mais pas nécessairement libre de droits d’auteur. Miriam Katzeff et James Hoff de Primary Information ont réédité des documents historiques « perdus » qui approfondissent le discours contemporain, comme leur édition en fac-similé de la série de pamphlets Great Bear (2007), revue d’art des années 1960. Four Corners Books réédite des œuvres littéraires dans une série intitulée Familiars, réalisée en collaboration avec des artistes qui revisitent des classiques tels que Dracula (2008), Vanity Fair (2010) et The Picture of Dorian Gray (2007). La stratégie du pirate plus insidieuse s’illustre dans des ouvrages tels que St-Pierre & Miquelon – Sexymachinery Issue A : Super Replica (2008), fac-similé d’une revue créée à l’origine par des membres d’Åbäke ; The National Security Strategy of the United States of America (2003) chez Winterhouse Editions, qui s’est contenté de rééditer et de distribuer ce document officiel du gouvernement américain connu par la suite comme la Doctrine Bush ; ou How to Build Your Own Living Structures (Revisited) (2009), chez Rollo Press (2009), fac-similé en noir et blanc du classique de Ken Issacs sur les meubles en kit, publié en 1974, que l’on s’échange, mais qui n’est pas disponible à l’achat. Le remix ou la stratégie de l’Extended Play est illustrée par Extended Caption (DDDG) (2009), qui revisite les articles de Dot Dot Dot, influente revue design-art publiée par Bailey, parmi laquelle quarante-trois articles et essais ont été sélectionnés pour figurer dans l’ouvrage.

À l’instar de l’ordinateur personnel qui a élargi l’accès et la participation au monde de l’édition, le Web 2.0 non seulement brouille la distinction entre designers et utilisateurs, mais aussi entre production et consommation. Le travail n’est plus distinct mais dispersé, la création n’est plus autonome mais interdépendante. Prenons trois exemples : celui d’abord de 99designs, un service en ligne qui propose à ses clients d’acquérir un logo au prix très, très compétitif de 99 dollars (pour obtenir les droits exclusifs sur le modèle, rajoutez encore 199 dollars). C’est mettre l’art avant les bœufs. Comme les profils sincères sur un site de rencontres, ou comme les robes de mariée sur un catalogue de vente par correspondance, plus de 13 000 logos préexistants n’attendent que vous. Choisissez en un et le nom de votre entreprise viendra s’ajouter au design, qu’il est encore possible de davantage personnaliser pour répondre à vos besoins. Le second exemple est celui de Mechanical Turk, un service offert par Amazon.com qui met en relation des personnes cherchant à faire effectuer des tâches simples, lesquelles ne peuvent être réalisées par un ordinateur car elles nécessitent une soi-disant intelligence humaine (comme juger de la qualité des images, identifier des chanteurs sur des CD, écrire des descriptions de produits), avec des travailleurs faiblement rémunérés, souvent quelques centimes seulement par emploi – sorte d’équivalent numérique du travail à la pièce. Dans les deux cas, la main-d’œuvre de milliers de travailleurs indépendants (c’est-à-dire, les travailleurs contractuels) a été agrégée, c’est l’externalisation par le crowdsourcing. Mise à part la qualité douteuse et les ambiguïtés éthiques de ces pratiques, ces deux exemples illustrent une transformation culturelle à vaste échelle de la notion de travail, dont la nature devient de plus en plus immatérielle et atomisée, avec des impacts sur la production et la consommation19.

Troisième exemple enfin, celui de Philip M. Parker, professeur de Marketing : un éditeur prolifique qui a produit plus de 100 000 livres en utilisant un processus automatisé de recherche en ligne, d’écriture et de mise en page. Il publie des livres et rédige des rapports numériques sur une étonnante gamme de sujets, allant de l’histoire de l’anime japonais et des manuels médicaux dans des domaines aussi variés que le syndrome des jambes sans repos ou la chirurgie de la cataracte, ou des rapports d’entreprises sur toutes sortes de sujets comme l’engouement des chinois pour les cuvettes de toilettes en bois, les ventes de bouteilles d’eau aromatisée au citron au Japon, et les ventes de sacs de golf en Inde. Parker utilise l’approche de « la longue traîne » qui consiste à multiplier l’offre de livres vendus en faible nombre d’exemplaires sur un marché de niche20. Cette stratégie, couplée à la quasi-élimination de l’emploi humain, a produit une entreprise d’édition inversée, dans laquelle un rapport détaillé, susceptible de ne servir les intérêts que de quelques-uns, voire que d’un seul individu, peut produire des bénéfices s’élevant à quelques centaines de dollars. Ces tâches sont souvent réalisées en moins de trente minutes à l’aide de systèmes entièrement automatisés, qui intègrent le plus souvent l’impression à la demande (éliminant les coûts de stockage), avec des frais de production de l’ordre « d’une dizaine de centimes pour l’électricité »21.

L’ancienne dichotomie entre travail intellectuel et travail manuel, qui est au cœur des débats internes au métier de designer graphique, est dépassée, non seulement parce que cette distinction est suspecte d’un point de vue théorique, mais également parce qu’elle ne fait état que des actions et des rôles possibles pour ses acteurs officiels (les designers graphiques) alors qu’il existe tout un faisceau de relations et de réseaux sociaux, complexes et fluides, dans lesquels ces acteurs sont imbriqués, en liaison avec d’autres susceptibles ou pas de jouer leurs propres rôles créatifs et productifs. Metahaven, dans White Night Before A Manifesto (2008), explore l’incapacité des manifestes du design à produire des changements : « Maintenant que les principaux outils de design – l’ordinateur et ses logiciels – sont répandus parmi les praticiens et se sont démocratisés, il est improbable que cette dichotomie au sein de la profession remporte l’adhésion dans un prochain manifeste du design. Les contenus générés par les utilisateurs ne sont pas la contribution que des amateurs apporteraient au noyau stable des professionnels, mais ils représentent une transformation fondamentale de la profession et de la valeur créée par son travail. Les professionnels du métier ne retrouveront plus le rôle essentiel que le graphisme prétendait avoir du temps où les usagers n’avaient ni la maîtrise de ses outils ni accès à ses services. Il paraît désormais plus vraisemblable que le fossé se creusera, parmi les designers professionnels, entre célébrités et ouvriers du design. Un tel fossé existe déjà chez les architectes. Par conséquent, pour un manifeste du design, une nouvelle alliance entre designers et utilisateurs est probablement la meilleure voie à suivre22. »

Metahaven cite ensuite le « Manifeste GNU » (1985) de Richard Stallman comme un exemple réussi d’une conception du travail radicalement différente, qui fait état de travail sur commande, de droits de la propriété intellectuelle et de propriété collective. Stallman est l’initiateur du mouvement du logiciel libre, qui devait ensuite inspirer l’open source, le partage de fichiers et le copyleft. Toutes ces technologies s’appuient sur le droit des créateurs d’établir une alliance directement avec les utilisateurs pour le partage de leur travail. Le Manifeste de Stallman intervint dans un contexte social très différent de celui d’aujourd’hui, mais qui le préfigurait. Le programmeur – figure symbolique de la post-production – énonce un principe simple mais radical : « Pour moi, la règle d’or, si j’aime un programme, c’est que je me dois de le partager avec d’autres qui aiment ce programme23. »


  1.  Ed Fella, conférence au Walker Art Center, Minneapolis, 25 mars 2008, walkerart.org/magazine/ed-fella 

  2.  Stewart Brand, « Purpose », The Whole Earth Catalog, Portola lnstitute, Menlo Park, CA, 1968, p. 3. 

  3.  Steve Jobs, discours inaugural à Stanford University (12 juin 2005), disponible 20 juin 2011, news.stanford.edu/news/2005/june15/jobs-061505.html 

  4. Charles Q. Choi, « Human Evolution : The Origin of Tool Use », 11 novembre 2009, 20 juin 2011, livescience.com 

  5. Lorraine Wild, « The Macramé of Resistance », Emigre 47 (Été 1998), p. 15. [Un extrait de ce texte à été publié en français in Le Graphisme en texte, éd. Pyramid, 2011, p. 84–86. 

  6. Jonathan Puckey, « On Tools », manuscrit non publié fourni par l’auteur, 11 juin 2011. 

  7. Wild, « The Macramé of Resistance », p. 23. 

  8. Ibid., p. 20. 

  9.  Virginia Postrel, The Substance of Style : How the Rise of Aesthetic Value is Remaking Commerce, Culture, and Consciousness, HarperCollins, New York, 2003, p. 178. 

  10.  Metahaven, White Night Before A Manifesto, Onomatopee, Eindhoven, 2008, non paginé. 

  11.  Voir Faythe Levine et Cortney Heimerl, Handmade Nation : The Rise of Dl Y, Art, Craft, and Design, New York, Princeton Architectural Press, 2008) ; et Ellen Lupton, DIY : Design It Yourself, Princeton Architectural Press, New York, 2006. 

  12.  Voir R. Gerald Nelson, DDDDoomed : Or, Collectors & Curators of the Image-A Brief Future History of the Image Aggregator, lulu.com, 2010. 

  13.  Mark Dudlik, Adria Robles-Morua, et Tanner Woodford, Interview de Experimental Jetset, Fill Stroke Magazine, janvier 2008 ; réédition 2011, disponible 20 juin 2011, experimentaljetset.nl/archive/fillstroke 

  14.  Voir Ellen Lupton, « The Designer as Producer », essai, in Graphic Design Now in Production, Walker Art Center, Mineapolis, 2011, p. 12–13. 

  15.  Dessins de logo BP visibles sur la page Flickr, flickr.com/photos/greenpeaceuk/sets/72157623796911855/ 

  16.  Scott Thomas, Designing Obama, Post Press, Chicago, 2009/2011. 

  17.  Experimental Jetset, « T-Shirtism », octobre 2005), disponible 20 juin 2011, experimentaljetset.nl/archive/t-shirtism 

  18. Nicolas Bourriaud, Postproduction, Les Presses du réel, Dijon, 2004, p. 13. 

  19. Voir Maurizio Lazzarato sur « lmmaterial Labor », et Michael Hardt sur « Affective Labor », textes disponibles sur generation-online.org et dans Michael Hardt and Antonio Negri, Empire, Harvard University Press, Cambridge, MA, 2001. 

  20. Pour une explication de la théorie de la « longue traîne », voir Chris Anderson, The Long Tail : Why the Future of Business is Selling less of More, Hyperion, New York, 2006. 

  21.  Noam Cohen, « He Wrote 200,000 Books, but Computers Did Some of the Work) », New York Times, 10 avril 2008, disponible 20 juin 2011, nytimes.com/2008/04/14/business/media/14link.html 

  22.  Metahaven, White Night Before A Manifesto, non paginé. 

  23.  Richard Stallman, « GNU Manifesto », 1985, wikipedia.org 

Sommaire nº 47
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